La toscane en 2010, campagne de San Gimignano

samedi 10 septembre 2011

MA PETITE HISTOIRE DU 11 SEPTEMBRE

Soir du 10 septembre, par Manon



Tout commence avec un accent... Je suis à Paris avec mon père, dans un des ces restos gaulois sur l'île St-Louis. Je me sens comme Astérix en compagnie d' Obélix, on mange, on boit on se sert à même le tonneau, on coupe nos charcuteries avec de gros couteaux Opinel, c'est rustique et on aime ça, on retrouve un peu de Québécois dans cette façon de faire. On rit, on se moque des Français coincés qui se demandent ce qu'ils font là à manger avec leurs mains. On a le droit de se moquer des Français chez nous, si mon père commence...étant français lui même, il a une avance. La soirée est agréable et nous relatons notre semaine à Paris. Nous étions là pour les funérailles de mon grand-père, ou nous ne pouvons assisté, car la bureaucratie française est si lourde que le corps de mon grand-père sera exposé que le 12 septembre et nous, nous partons demain le 11 septembre. 

Durant cette soirée la proximité des autres clients est très proche dans ce genre de restaurants, les grandes tables permettent d’asseoir plein de gens ensemble qui se connaissent ou pas. C'est charmant, nous rencontrons un couple un Tunisien et une Marocaine, ils sont là pour célébrer quelque chose. Nous passons la soirée avec eux à discuter de religion, mon père adore l'histoire et il en connait beaucoup sur les guerres et autres religions. Étant musulmanes, nos connaissances sont très surprises que des occidents soient aussi renseignés et ouverts d'esprit. 

Durant la soirée, l'homme me demande si je vais bien avec le regard profond que seul un arabe ose faire! (Il a raison, je suis en plein questionnement sur ma vie amoureuse et professionnelle) Sans que je puisse répondre, il me dit que tout ira bien, de croire en moi et que nous allons probablement aller aux funérailles de mon grand-père? 

Il prend ma main et y place dans ma paume, un petit objet, un coquillage qu'il a ramassé sur une plage de Tunisie la veille. Il me dit que c'était pour lui sa façon de se rattacher à son pays et qu'il me l'offre pour me protéger, car je suis une bonne personne. Ce coquillage est toujours dans mon porte-feuille depuis 10 ans...


Journée du 11 septembre par Papa (Jean-Pierre Curie)

Le 11septembre, je me trouvais à Paris avec Manon pour les funérailles de mon père. Il était environ 15 heures. Nous nous trouvions rue Monge, non loin des arènes de Lutèce, à un carrefour ou il y avait un bar café et une horloge. Manon était allée à la toilette et revient me trouver en proie à une crise de panique quelque peu hystérique ; elle criait ‘’ je veux voir mes enfants’’ à répétition…je parviens à la calmer un peu, elle me dit ‘’ c’est la guerre, ils ont attaqué New York ! je l’ai vu à la télé au bar café ! Je m’approche donc de la télé que nous pouvions voir du trottoir ; il y avait un genre de cartoon ou un avion se jetait dans une tour, une fois à gauche et ensuite dans l’autre tour à droite , la couleur du fond d’écran ressemblait à un soleil irradiant, orangé rougeâtre. Quelques secondes, j’entends des gens parler de l’attaque du World Trade Center par des kamikazes, j’en suis resté ébahit.

Il faisait très chaud, une lourdeur moite, l’activité de la rue cessait, la rue se vidait peu à peu. Nous sommes entrés dans ce bar café et nous avons pris une consommation; Manon un porto moi une bière. Quelques heures passent, Paris est presque vide, plus de transport en commun. Nous décidons donc de rentrer à pied à l’hôtel que nous avions rue Straud dans le 13e arrondissement, du quartier chinois. Nous avons traversé le Quartier Latin jusqu'à côté la rue mythique’’ de La Mouffetard ‘’ou nous avons fait des provisions, pain, fromages, charcuterie et quelques très bons vins. Nous avons ensuite remonté l’avenue des Gobelins jusqu'à la place d’Italie et ainsi de suite jusqu’à l’hôtel. Une sensation de solitude, d’abandon me parcourait les sens. Nous avons passé la soirée à regarder la TV en mangeant nos provisions. Durant la soirée, j’ai boucané Manon, notre petite chambre ressemblait plus à un fumoir, avec en plus, ce quelque chose de surréalisme que laissait la fumée, une ambiance irréelle presque appropriée au moment….. Le lendemain, la réalité nous a rejoints…….. jpc

Journée du 11 septembre par Manon

Hystérique, est le mot qui décrit bien ma journée. Papa je suis désolés de t'avoir infligé ce comportement et je dois m'excuser pour toute les méchancetés, rien n'était de ta faute.

J'ai eu tellement peur de ne plus retourner chez moi auprès de Sylvain et des enfants.



Le 12 septembre, par Manon

Nous sommes allés aux funérailles de Papi...tout au long de la cérémonie, je tapotais mon coquillage. Ça me semble irréaliste, encore aujourd'hui et pourtant.

Le 13 et 14 septembre, par Manon

Nous attendons l'heure, le jour de notre départ...on va l'aéroport, on nous retourne, on fait l'aller-retour pendant 2 jours c'est épuisant. Notre consolation est d'être dans l'appartement de mes grands-parent rue Cantagrel 13e arr., sur fond de CNN, nous regardons des albums photos de la jeunesse parisienne à mon père.

Le Québec a réussi à nous rapatrier le 15 sept.

Depuis ce jour, j'ai compris que plus rien ne sera pareil, nous serons toujours à la merci de la folie terroriste ou passagère. Difficile à accepter pour qui aime bien contrôler.

Septembre était mon mois préféré pour la rentrée, les couleurs, les récoltes, le retour au cocooning, 

Depuis dix ans,  j'ai cette sensation de perte de contrôle qui m’angoisse.  

Et pourtant, je suis en vie, en santé auprès de Sylvain et de mes enfants.

Manon

PS je suis devenue superstitieuse, mon coquillage doit me suivre partout,  surtout en avion»!